mars, 2010
FINANCER LES PME. VRAIMENT ?
La nécessité d’améliorer l’accès des petites et moyennes entreprises au crédit pour accélérer la croissance économique de nos pays constitue aujourd’hui un credo unanimement partagé, des bailleurs de fonds internationaux aux hommes politiques locaux.
Pourtant l’objet de ce consensus reste flou, ses contours mal définis et les informations chiffrées plutôt rares. Par exemple, les statistiques des Commissions Bancaires tant en Afrique Centrale qu’en Afrique de l’Ouest n’isolent pas les PME parmi l’ensemble des emprunteurs du système bancaire. Il est donc malaisé de repérer leur part dans l’endettement total des agents économiques.
Seule certitude: il y a déficit d’offre de crédit pour ces entreprises sous nos latitudes. La Banque Mondiale (1) révèle que 22% seulement des entreprises disposaient en 2009 d’une ligne de crédit auprès des banques et que pour 46% d’entre elles l’accès au crédit demeure une contrainte majeure pour leur développement. Les PME représentant 80% de la production et de l’emploi, les conséquences de la rareté du crédit sur le taux de croissance du PIB sautent aux yeux.
Cette situation résulte de causes multiples. L’une des principales tient à l’inadaptation des méthodes utilisées par les banques aux réalités des économies sub-sahariennes.
Les banques ont, en effet, été conçues pour répondre aux besoins de financement (i) des grandes entreprises, d’abord étrangères, (ii) à partir d’une analyse de ratios sommaires de situation patrimoniale.
Cette approche atteint ses limites dès lors qu’il s’agit de faire face aux besoins de financement (i) de petites entreprises, souvent à la limite de l’informel, (ii) ne disposant pas d’états financiers fiables ni d’un patrimoine pouvant servir de garantie.
Le défi du financement des PME impose que les banques modifient leur perspective et se positionnent pour financer les transactions bancables des PME au lieu de chercher à financer l’entreprise elle-même.
Pour ce faire, l’accent doit porter sur l’identification et la capture des flux de liquidité générés par la transaction proposée et non plus sur la solvabilité de l’emprunteur.
Il doit aussi porter sur le développement d’une réelle expertise produits. Dans la plupart de nos banques celle-ci manque trop souvent, l’effectif étant pour l’essentiel constitué de chargés de clientèle et de personnels du risque. Sans une telle expertise, il est impossible de confectionner des solutions de financement réellement adaptées à la spécificité du client.
Sans une telle remise en cause, le financement des PME restera une antienne.
(1) World Bank Enterprise Survey 2009
Louis ADANDÉ