décembre, 2013
PISA POUR TOUS ?
L’enquête PISA* 2012 de l’OCDE, organisme de réflexion réunissant les pays industrialisés, vient de livrer sa moisson de résultats. Cette étude, tri-annuelle, évalue les compétences des jeunes en fin de scolarité obligatoire (donc âgés de 15 à 16 ans) en mathématiques, compréhension de l’écrit et en sciences. Cette année, 510 000 élèves de 65 pays, dont 31 n’appartenant pas à l’OCDE ont été testés. L’étude PISA permet notamment de mesurer la performance du système éducatif d’un pays et de la comparer dans le temps avec sa performance passée et dans l’espace avec celle des pays similaires. Elle est un élément essentiel de la boite à outils des décideurs nationaux pour piloter de façon pragmatique et transparente l’évolution de leur système éducatif en termes de performances, d’utilisation des ressources et d’équité tant sociale que de genres.
Parmi les 31 pays hors OCDE, ayant participé à l’enquête 2012, ne figure aucun pays d’Afrique sub-saharienne alors que l’Asie et l’Amérique latine en fournissent les plus gros contingents. Depuis le lancement de ce programme en 2001, seuls trois pays africains, Maurice, l’Algérie et la Tunisie ont connu au moins une participation à l’étude.
L’absence de l’Afrique sub-saharienne étonne d’autant plus que les enjeux de la qualité de l’enseignement d’un pays sont bien connus. Un système éducatif performant – c’est-à-dire capable d’équiper les jeunes des compétences clé pour fonctionner dans le monde d’aujourd’hui- et équitable, -c’est-à-dire que très peu de jeunes achèvent leur scolarité sans avoir acquis ces compétences- confère de nombreux avantages économiques et sociaux. Au plan économique, un tel pays verra sa productivité et son attractivité pour les investissements directs étrangers s’améliorer. Dans un second temps, ces progrès lui permettront de s’insérer de façon plus active et choisie dans la mondialisation des activités de production puis d’innovation. La performance éducative constitue, par conséquent, le lien entre le niveau de la croissance économique et son contenu. Au plan social, un pays dont la jeunesse est bien formée et donc mieux employée jouira, à priori, d’une plus grande stabilité sociale et politique et sera de ce fait moins exposé aux risques de crises violentes, notamment armées.
On objectera que nos systèmes éducatifs sont encore loin de soutenir la comparaison avec ceux des autres pays émergents ou en développement. Que participer à l’enquête a un coût. Toutes objections vraies mais non recevables. En effet, nos pays trouvent toujours les fonds pour des activités moins prioritaires. Mais, plus fondamentalement, peu importe notre point de départ, l’important est la trajectoire de progrès dans laquelle nous nous inscrivons. Depuis 2001, l’enquête PISA a montré deux choses : d’abord que les situations dans le domaine éducatif peuvent évoluer relativement vite, de l’ordre de la décennie. Ensuite que la taille et les ressources d’un pays ne sont pas les facteurs explicatifs les plus importants dans les améliorations connues par les systèmes éducatifs.
On ne peut espérer traiter un problème s’il n’a pas été mesuré et paramétré. L’étude PISA donne aux décideurs des données plus pertinentes et plus dynamiques que les statistiques d’alphabétisation servant encore aujourd’hui de boussole à nos choix de politiques éducatives. Cinquante ans après les indépendances, il est plus que temps de passer à l’étape suivante. Les données PISA y contribuent fortement.
* Programme for International Students Assessment
Louis ADANDÉ